Comment l’entreprise à impact va réinventer la direction financière
Pour renforcer l’interaction des entreprises avec la société, il est nécessaire de repenser le rôle de la direction financière et administrative (DAF) avec des missions élargies. Par Marion Darrieutort et Antoine Lemarchand, coprésidents d’Entreprise et Progrès et respectivement Présidente d’Elan Edelman et DG de Nature et Découverte, et Christine Durroux, vice-présidente d’Entreprise et Progrès et associée chez Kea&partners.
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OPINION. Pour renforcer l’interaction des entreprises avec la société, il est nécessaire de repenser le rôle de la direction financière et administrative (DAF) avec des missions élargies. Par Marion Darrieutort et Antoine Lemarchand, coprésidents d’Entreprise et Progrès et respectivement Présidente d’Elan Edelman et DG de Nature et Découverte, et Christine Durroux, vice-présidente d’Entreprise et Progrès et associée chez Kea&partners.
RSE, raison d’être, innovation positive, impact, économie bienveillante… Nous sommes infatigables quand il s’agit d’inventer de nouveaux mots pour qualifier l’interaction de nos entreprises avec la société. On risquerait d’oublier que les intentions sont fragiles. Elles sont vulnérables aux fusions, aux crises, aux réformes sociales ou fiscales, aux changements de dirigeant.
Pour sanctuariser la mission hors les murs qu’elle se fixe, l’entreprise doit aller plus loin. Elle doit modifier la manière dont elle utilise les ressources et produit, elle doit aligner son fonctionnement sur sa promesse. Aucun département de l’entreprise n’est à l’écart de cet enjeu, aucun n’est sans portée sur ce qui se passe à l’extérieur, mais il en existe un dont le pouvoir d’entrainement ou de blocage est sans équivalent : la direction administrative et financière (DAF).
Depuis une trentaine d’années, le DAF a conquis une position de choix dans l’entreprise, au point de se substituer souvent au directeur de la stratégie. Le DAF occupe un périmètre majeur. Il est chargé de l’allocation du capital avec, par conséquent, le pouvoir de dire oui ou non à des projets. Il pilote les projets d’acquisitions et de croissance externe. Il contrôle l’audit, ce qui lui confère une connaissance ultra fine de l’entreprise. Il gère aussi la communication financière, stratégique dans les grands groupes cotés. Enfin, il reste généralement à son poste plus longtemps que le directeur général. Puissance, connaissance, résilience.
Trois forces pour une nouvelle performance
L’entreprise à impact, celle qui veut imprimer sa marque d’une manière positive et durable, doit mettre ces trois forces au service de sa nouvelle performance. Elle a besoin d’un nouveau DAF, capable de réviser l’ensemble de ses fonctions à l’aune de la raison d’être et de la responsabilité. Ce DAF augmenté prendra en main, explicitement, l’alignement entre financement, allocation de ressources, objectifs financiers, communication financière et, bien sûr, les investissements. Il devra donner son feu vert à des projets renforçant la raison d’être de l’entreprise, que le DAF du monde d’avant aurait sans doute jugé « non rentables ».
Le nouveau DAF sera un acteur clé de la gouvernance de l’entreprise. Il arbitrera entre les dépenses immédiates et les actions de long terme ; il tranchera contre les exigences trop brutales de rentabilité ; il fera œuvre de pédagogie auprès des salariés pour qu’ils comprennent bien les normes internationales auxquelles obéit leur employeur ; il sélectionnera les partenaires bancaires capables de comprendre sa raison d’être ; il installera une relation sincère, régulière et juste avec les actionnaires.
Intégrer l’extra financier
Concrètement, il devra innover pour doter son entreprise d’un arsenal d’indicateurs capables de valoriser l’impact en intégrant l’extra financier. Ces indicateurs clés de performance (KPI) à 360 ° serviront à décrire toute l’activité de l’entreprise, pas seulement celle que calculent les indicateurs financiers. Pour maximiser les impacts positifs et limiter ses impacts négatifs, il allouera des ressources à des projets structurants : valoriser les actifs immatériels de l’entreprise, gérer la conformité, les risques et les enjeux d’éthique, développer une influence sur les normes.
Le nouveau DAF est une nécessité pour l’entreprise qui veut réellement entrer dans l’ère de l’impact. A lui de garantir que la responsabilité et le profit ne se font pas concurrence.
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