Entreprise Fraternelle : rencontre avec Jullien Brézun et Damien de Colombel

Pouvez-vous nous présenter la genèse de cette réflexion sur l’Entreprise Fraternelle 

Mettre l’humain au cœur du projet de l’économie et de l’entreprise est l’ADN de notre think tank. Déjà en 1972, dans le discours d’Antoine Riboud (Danone), la dimension écologique et la dimension humaine sont présentes. Depuis plus de 50 ans, Entreprise et Progrès s’attache à perpétuer ce projet social qui réconcilie l’économique et le social.

Seulement, il nous semble que la notion de fraternité est devenue moins prioritaire par rapport aux deux autres notions de notre devise républicaine par exemple. Nous pensons donc qu’il est indispensable que les entreprises s’emparent de cette thématique de la fraternité pour qu’elle ne soit plus un simple mot écrit sur les devantures de nos mairies.

Les entreprises sont un acteur clé de notre société. Au-delà de leur responsabilité économique, elles ont une responsabilité morale. Les entreprises sont aussi des groupements de citoyens. La notion de fraternité doit donc avoir une résonance dans l’entreprise. Nous souhaitons donc aider les entreprises à répondre à une demande de fraternité.

Qu’est-ce qu’une entreprise fraternelle ? 

Il s’agit de se demander comment l’entreprise s’engage dans une démarche morale, comment les entreprises contribuent à un modèle plus général qui fait progresser la société.

La fraternité renvoie à une relation équilibrée à l’autre. L’enjeu est de créer une relation forte, stable, durable, avec toutes les parties prenantes, sans abus de pouvoir et sans recherche de réciprocité immédiate. Les premiers concernés sont bien sûr les collaborateurs. Mais la fraternité doit aller au-delà des relations internes : une entreprise doit aussi être fraternelle avec ses clients, ses fournisseurs, ses prestataires, ses concurrents… la Société entière.

Une entreprise fraternelle donne une cohérence, une structure, un élan à cet engagement vis-à-vis de l’autre.

Quelle différence entre l’Entreprise Fraternelle et une entreprise de l’ESS ? 

Certaines associations ont la fraternité pour raison d’être. Il faut maintenant étendre cette raison d’être à toutes les entreprises.

Toutes les entreprises peuvent être fraternelles ! 

C’est un mode de fonctionnement. L’entreprise fraternelle représente l’alliance entre les organisations classiques et les entreprises de l’ESS (Économie Sociale et Solidaire). Si on laisse uniquement les entreprises de l’ESS être des entreprises fraternelles, l’effet démultiplicateur n’est pas suffisant.

Pourquoi une entreprise doit-elle devenir fraternelle ? 

Les entreprises ont besoin de faire perdurer les conditions de succès de notre projet démocratique. Dans le cas inverse, elles ne pourront plus se développer. L’actualité nous montre tous les jours combien l’absence de fraternité à un impact immédiat sur les organisations.

Malheureusement, il faut souvent passer par des une crise ou des événements majeurs pour prendre conscience de ces besoins. Sans attendre des événements tragiques, la fraternité devrait s’imposer à toutes les entreprises.

Les grandes difficultés que nous avons à gérer à long terme appellent à une fraternité humaine. Sans fraternité, les fractures et les ruptures de notre société vont s’amplifier. Sans fraternité, nous ne pourrons pas faire face aux risques qui se préparent.

Le chantier qui s’ouvre ce jeudi 21 septembre avec nos membres a pour ambition de provoquer une réflexion dans les entreprises et d’ouvrir des pistes d’actions à mettre en œuvre pour suivre la trajectoire de la fraternité.