Croissance : la fin d’un mythe ?

Il y a 50 ans, des chercheurs du MIT publiaient le rapport Meadows, qui déjà, alertait sur les risques d’une croissance exponentielle et infinie dans un monde aux ressources limitées. 50 ans après, la croissance mondiale s’est considérablement transformée : presque à l’arrêt durant ces 20 dernières années en Europe, ralentie partout dans le monde […]

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Il y a 50 ans, des chercheurs du MIT publiaient le rapport Meadows, qui déjà, alertait sur les risques d’une croissance exponentielle et infinie dans un monde aux ressources limitées. 50 ans après, la croissance mondiale s’est considérablement transformée : presque à l’arrêt durant ces 20 dernières années en Europe, ralentie partout dans le monde par la crise écologique et sociale, heurtée par les crises financières ou la Covid… Et s’il était temps de s’interroger vraiment sur la croissance ? Ne faut-il pas inventer un autre horizon pour nos systèmes économiques et sociaux ? Comment redéfinir notre projet de société et y embarquer les entreprises ?

Décryptage avec ce premier atelier de notre chantier de réflexion autour de la croissance (“Crois-sens”) du 2 septembre 2022, en présence de Timothée Parrique, docteur en économie, spécialiste de la décroissance et auteur du livre “Ralentir ou périr”, et Laurence Peyraut, Secrétaire Générale de Danone France. Un entretien animé par Benjamin Zimmer, CEO de Silver Alliance, et Albane Liger-Belair, directrice de l’innovation chez KPMG France.

Redéfinir la croissance et la décroissance

Sobriété, décroissance, « économie de la soustraction » ou du renoncement…. Beaucoup de termes existent pour désigner les alternatives à la croissance. Mais n’est-ce pas le terme croissance lui-même qu’il tiendrait de redéfinir ? Car il peut être une analogie trompeuse, basé sur le mythe de l’exponentielle infinie et illimitée. En comparant plutôt la croissance économique à une forme d’agitation, cela permet de mieux percevoir ses limites et ses impasses.

La croissance devrait en réalité être vue comme solution à une situation de manque, or, quand elle est le mode de fonctionnement par défaut d’une économie développée, elle fait apparaître des effets pervers, notamment un épuisement des ressources. D’autant plus qu’on observe que sur le long terme le PIB n’est plus corrélé avec le bien-être.

On peut donc légitimement se demander si nous n’arrivons pas dans l’objectif d’une ère post-croissance, liée à une économie de la sobriété qui consisterait à satisfaire nos besoins sans dépasser les limites planétaires. La décroissance devenant ainsi une stratégie de sobriété à un niveau macro économique.

Un point de vue différent sur la performance en entreprise

Pour les entreprises, cela questionne bien sûr leur rôle social et environnemental, et particulièrement leurs indicateurs de mesure de croissance. Longtemps cantonnés à des KPI financiers, désormais il faut poser une autre façon de mesurer ce que l’on produit et sa performance, dans une optique autre que celle de la croissance pure. La contribution à l’intérêt général et au bien être devient un critère de plus en plus scruté dans les entreprises.

Il faut donc mettre sur le devant de la scène les indicateurs dit “non financiers”, axés sur les valeurs sociales et environnementales. Un projet qui doit s’insérer dans la gouvernance et accompagner toute la chaîne de valeur dans la décarbonation des activités. Le tout renforcé par des alliances entre entreprises, afin de mutualiser la transformation de modèle et son coût.

De nouvelles perspectives économiques

Une économie sobre se repose aussi sur des choix, une hiérarchie des indicateurs (par exemple valoriser les indicateurs environnementaux face à une crise écologique majeure) et ce que l’on appelle désormais le “renoncement”, afin de retrouver une économie soutenable. Réduire son activité pour préserver les matières premières, un concept qui chamboule profondément les modèles économiques classiques.

L’économie étant le principe du rationnement, il faut renouer avec cette notion pour produire et consommer de manière raisonnée, et satisfaire nos besoins avec moins de ressources. Cela signifie tendre vers une économie de la sobriété, et trouver des modèles d’inspiration moins lucratifs pour les entreprises, comme le modèle des Société Coopérative d’Intérêt Collectif (SCIC) par exemple.

Un challenge difficile, mais nécessaire pour préserver le bien être des générations futures !
Ces perspectives interrogent beaucoup d’entreprises, qui se retrouvent face aux limites de la machine capitaliste et doivent repenser leur business modèles. Ce sera le sujet de notre 2e atelier, le 21 septembre en présence de Dominique Schelcher (PDG de Système U) et Thibault Lamarque (Fondateur et Président de Castalie).